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- Actualités Vaudoises - Frédéric Dovat

Luttons contre la pénurie de logements et ses effets néfastes

F.Dovat
Frédéric Dovat
Rédacteur

A l’heure de la rareté des terrains constructibles imposée par la loi fédérale sur l’aménagement du territoire (LAT) et des oppositions aux projets de construction, le taux de logements vacants se réduit et les loyers augmentent. Une révision de la LAT et un cadrage des initiatives populaires s’imposent afin de lutter efficacement contre la pénurie de logements.

Densification et pénurie de logements

En 2013, le peuple vaudois acceptait, à une très large majorité, la révision de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire (LAT). Cette révision prévoyait notamment une densification des zones urbaines, afin d’éviter le mitage du territoire avec des constructions dans des zones peu densifiées. En outre, elle prévoyait que les zones à bâtir surdimensionnées devaient être déclassées en zones agricoles. Une taxe sur la plus-value résultant des classements des zones agricoles en zones à bâtir est aussi prévue, le produit de cette taxe devant indemniser en particulier les propriétaires voyant leurs parcelles à bâtir déclassées en zones agricoles. 

Par ailleurs, depuis ces quelques dernières années, la Suisse connaît une pénurie de logements due à une demande robuste, stimulée en particulier par son attractivité économique. Au 1er juin 2023, le taux de logements vacants dans le canton de Vaud est de 0.98%, alors que le marché est réputé équilibré lorsque le taux de logements vacants se monte à 1.5%. Ce déséquilibre de l’offre engendre une pression haussière sur les loyers et rend plus difficile la recherche de logement, ce d’autant plus pour les personnes à revenus modestes. En outre, la pénurie engendre également des déplacements de la population vers des zones où les loyers des logements sont moins élevés et qui sont plus éloignés de leur lieu de travail, ce qui ne manque pas de surcharger les infrastructures de transport.

«Si les citoyens ne veulent plus d’une révision votée en 2013, les autorités politiques se doivent de l’assouplir et de cadrer l’exercice du droit de l’initiative populaire afin de lutter contre la pénurie de logements et tous ses effets néfastes»

Blocage des projets de constructions et insécurité juridique

La densification et la pénurie de logements devraient logiquement et raisonnablement conduire à une hausse des constructions en milieu urbain. La réalité est tout autre. En effet, non seulement les procédures administratives sont très longues et coûteuses, de sorte que plusieurs années s’écoulent entre le moment du dépôt de la demande de permis de construire et la réalisation du projet de construction, mais à supposer que le permis soit délivré, l’investisseur n’est pas à l’abri du dépôt d’une initiative populaire communale.

Alors que le projet de construction est légalisé, qu’il a pu faire l’objet d’oppositions, des citoyens utilisent, comme ultime recours, l’outil de l’initiative populaire afin de faire échouer des projets de construction. Animés par des intérêts purement personnels, ces citoyens se mettent à faire de la planification territoriale par le biais de l’initiative populaire, alors que l’aménagement du territoire implique une multitude de pesée d’intérêts et doit être pensé dans sa globalité et non parcelle par parcelle.

Prenons le cas du projet de constructions «Les Grands Prés» à Montreux qui a échoué en votation populaire, alors qu’il s’inscrivait dans un écoquartier, qu’il prévoyait un certain nombre de logements d’utilité publique dont des logements à loyers abordables et une crèche. Le projet de construction «Valleyre» au Mont-sur-Lausanne, qui privilégie le naturel sur le bâti, fondé sur un plan de quartier légalisé et en force, fait également l’objet d’une initiative populaire.

Ces initiatives bloquent donc des projets de construction, ce qui n’est pas sans conséquence, à l’heure de la densification et de la rareté des parcelles constructibles. En effet, par ce blocage, la pénurie de logements s’accentue, les loyers prennent l’ascenseur et nos enfants auront de plus en plus de peine à se loger. Par ailleurs, les développeurs immobiliers sont confrontés à une grande et grave insécurité juridique. Ils investissent des montants importants dans leurs projets, fondés sur des plans d’affectation et/ou permis de construire en force et, finalement, ceux-ci sont remis en cause par la population communale.

A terme, cette insécurité juridique découragera les investisseurs, qui se détourneront de la pierre, ce qui accentuera encore la pénurie de logements et l’activité de la construction en pâtira, avec une menace sur l’emploi.

Dans ces conditions, si les citoyens ne veulent plus d’une révision votée en 2013, les autorités politiques se doivent de l’assouplir et de cadrer l’exercice du droit de l’initiative populaire afin de lutter contre la pénurie de logements et tous ses effets néfastes.

Baptiste Müller
Rédacteur responsable



Frédéric Dovat,
Responsable politique aménagement du territoire et immobilier

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